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Nouvelles du bord: jour 55!

Après avoir écrit tout heureux que ma stratégie avec la dépression avait fonctionné mieux que je ne le pensais, la nature m’a envoyé un petit rappel du fait que c’est elle qui décide!


Alors que le baromètre montait, le vent était stable et fidèle aux prévisions, j’avais laissé le bateau avec un plan de voilure assez conservateur. Je filais vent arrière dans 25-30 noeuds de vent avec de beaux surfs et 2 ris dans la grand-voile + mon solent (voile d’avant de taille medium), heureux de ces conditions quand…. BAM! Le bateau s’est couché dans une rafale et j’ai immédiatement entendu le bruit si caractéristique d’une voile qui se déchire. Ce fût la la seule rafale mais elle était à 50 noeuds et en quelques secondes, l’énorme pression avait déchiré la voile du guindant jusqu’à la chute. Un maitre de Kung Fu n’aurait pas fait mieux, un mouvement rapide et efficace!


Le solent n’est pas sur une drisse (bout qui sert à mettre hisser une voile), il est maintenu en place sur un cable donc quand il s’est déchiré, la majorité de la voile a glissé sur le pont. Je l’ai vite mis à l’intérieur mais une petite partie de la voile est restée en l’air à me défier, les bouts de tissus s’agitant dans le faisceau de ma lampe frontale (oh, oui évidement c’était en pleine nuit, sinon ce n’est pas drôle!) Il était hors de question de monter au mât en pleine nuit, j’ai donc hissé une voile plus petite après avoir décidé que ce qui restait en l’air ne pouvait pas faire de dommages supplémentaires.


La journée suivante était plus adaptée pour monter avec moins de vent mais la mer restait très formée à la suite de l’énorme dépression avec une houle de 3 à 4 mètres. Alors que je préparai la corde qui me permet d’habitude de monter au mât, les bouts de voile restant se sont mis à s’enrouler autour de celle-ci, et impossible de la libérer. J’ai donc mis en place une autre corde pour me hisser avec mon équipement de grimpe.


Plus on monte dans le mât plus les chocs du bateau sur l’eau sont amplifiés. J’ai beaucoup utilisé mes jambes et mes bras en « mode koala » en montant pour éviter de me faire trop secouer. Le haut de la voile étant à 25 mètres de hauteur, les bouts de voiles en lambeau se sont emmêlés dans ma nouvelle corde d’ascension, me bloquant sur place à mi-chemin. J’étais coincé, impossible de redescendre ou remonter et loin d’apprécier la vue pourtant très belle de là où j’étais. Finalement, j’ai réussi à libérer assez de corde pour continuer à monter mais il a fallu me battre pour chaque mètre gagné, un travail épuisant physiquement et mentalement.


Quand j’ai enfin réussi à atteindre le haut de la voile, j’ai coupé le lashing (système d’attache en bout) et la poche que j’avais passé du temps à réparer et libéré la voile pour qu’elle descende sur le cable. La descente était plus facile mais il a tout de même fallu batailler à nouveau avec ces « tentacules » de tissu!


J’ai mis un jour et une nuit à me remettre de la double peine: la mission compliquée de libération de la voile et surtout, la perte de celle-ci. Maintenant que j’ai soigné mes bleus et mes coupures, aidé le mental à renfort de soupe et sommeil, je suis content d’être toujours en course. Stéphane (Le Diraison) a démâté plus tôt dans la course à cause d’une mésaventure similaire et Mike Golding avant lui en 2008 pour la même raison. Je suis content d’avoir une bonne marge de manoeuvre avec le reste du peloton derrière mais il est certain que je vais être beaucoup plus lent que prévu dans certaines conditions dans les semaines à venir. Mais bon, j’approche du Cap Horn et avec une main attachée derrière mon dos, la course commence tout juste à devenir intéressante!


Ouch... no more solent jib © Foresight Natural Energy #Vendée Globe
Last part of the jib © Foresight Natural Energy #Vendée Globe

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